La prolifération des hannetons fragilise la forêt

Ils s’attaquent aux arbres, dévorent les racines comme les feuilles. Les hannetons, de plus en plus nombreux, fragilisent la forêt indivise et sa régénération. L’Office national des forêts de Haguenau mène depuis avril une étude expérimentale pour mieux connaître ce nuisible.

Dans une parcelle de la forêt indivise de Haguenau, à proximité de Soufflenheim, les chênes rouges sont presque à nus. « On a l’impression d’être en plein hiver, sauf que là on est au printemps et que ça devrait être tout vert », déplore Irène Bée, cheffe du service forêt à l’Office national des forêts (ONF) Nord Alsace. En l’espace de quelques jours seulement, des nuages de hannetons ont dévoré toutes les feuilles.

Les hannetons ont étendu leur territoire ces dernières années

Ces défoliations spectaculaires s’observent sur une bonne partie de la forêt de Haguenau. Le phénomène qui s’observe tous les quatre ans – les hannetons ne volent qu’à l’âge adulte pendant une courte durée qui varie de trois à six semaines- s’accentue. « Cela fait déjà deux cycles qu’on les observe. Les hannetons s’étendent sur le territoire. Ils raffolent du sol sableux plutôt sec de la forêt. Seule une petite partie de la forêt indivise est préservée », décrit Irène Bée. Le hanneton aurait sans doute profité des « trouées » générées par la tempête Lothar pour s’installer. L’abroutissement du gibier peut aussi lui être favorable, tout comme la sécheresse des dernières années.

Les larves dévorent jusqu’à 60 % de la masse racinaire des arbres

Les dégâts générés par les hannetons ne se limitent pas aux feuilles. Les larves se nourrissent également des racines des arbres : elles participent au dépérissement de la forêt et nuisent gravement aux parcelles en régénération. « Sur les arbres adultes et notamment les chênes à forte valeur économique, elles peuvent détruire jusqu’à 60 % de la masse racinaire. Leur capacité à absorber l’eau et les sels minéraux est limitée. Ils perdent de la vigueur et cela les rend encore plus vulnérables à d’autres attaques, d’autres parasites ou encore les aléas climatiques. Les plus jeunes individus ne survivent pas », s’inquiète Irène Bée.

On ne lui connaît aucun prédateur

Or, on ne connaît au hanneton aucun prédateur. « Si ce n’est l’humidité, quelques champignons qui lui sont défavorables, précise Irène Bée. On a constaté que la végétation au sol gêne la ponte des hannetons. Mais ce n’est qu’un facteur limitant. »

36 pièges à attractifs ont été installés en forêt

Cette année, afin d’estimer plus précisément la population des hannetons, l’ONF mène une étude expérimentale. Depuis le 11 avril, 36 pièges attractifs ont été installés en forêt de Haguenau. « Nous avons deux modèles de pièges différents et deux types d’attractifs. Nous verrons lesquels sont les plus efficaces », indique Irène Bée.

Alexis Mochel, étudiant en Master 2 à AgroParisTech est en charge de ce suivi. Il effectue des relevés une fois par semaine. Il inventorie les insectes, définit s’il s’agit de mâles ou de femelles, de hannetons communs ou forestiers. 1 300 insectes ont été capturés et analysés à ce jour. Alexis Mochel mettra en parallèle ses analyses avec une carte des défoliations qui sera réalisée par les agents forestiers.

Cette étude test pourrait être généralisée au territoire national. Elle sera menée dans les Vosges du Nord et à Fontainebleau en 2023, date prévue du grand vol sur ces secteurs. Une méthodologie fiable pourra alors être déployée pour le grand vol dans le sud de l’Oise en 2024. (selon DNA, édition de Haguenau)